Cette critique de livre, traduite de l’anglais par moi, a été publiée dans Bookforum (déc/jan/fév. 2022) (David Buxton)
Mark McGurl, Everything and Less : the Novel in the Age of Amazon, Verso (London : New York), 2021.
Inscriptions en baisse chez les étudiants, et parts de marché déclinantes chez les consommateurs ; confusion sur la méthode et imprécision de la mission … Les enseignants de lettres ont de bonnes raisons d’être inquiets sur le statut de la littérature et de la recherche littéraire. Et comme une personne anxieuse, la discipline elle-même s’intéresse de plus en plus au goût populaire, alors que sa propre popularité est en déclin. Entre 2007 (récession boursière) et 2019, le nombre d’inscrits en premier cycle de lettres aux États-Unis s’est rétréci d’un quart, et il est difficile d’imaginer que la pandémie puisse renverser cette tendance. Pendant la même période, les enseignants en littérature se sont détournés des chefs-d’œuvre, réels ou prétendus, qui ont composé le canon depuis la consolidation de l’anglais comme champ d’études dans les années 1930, en faveur de livres populaires. Parfois, il s’agit de livres appartenant à des genres oubliés ou méprisés comme les romans policiers, de science-fiction ou d’horreur ; c’est la popularité du point de vue de la consommation. Et parfois, il s’agit de livres écrits en grande quantité par des auteurs avec peu de lecteurs, quel que soit le genre ; c’est la popularité du point de vue de la production.
Il ne faut pas confondre la tournure populiste dans les études littéraires avec la guerre de Trente Ans à propos du canon. Lancée dans les années 1970, cette guerre s’est conclue par la reconnaissance générale que beaucoup d’écrivains féminins, queer, de couleur ou issus de pays périphériques méritaient aussi l’attention des universitaires. Après tout, les belligérants avaient simplement soutenu leurs propres candidats au titre d’Auteur majeur ou de Texte important ; rarement ont-ils contesté l’existence de ces titres ou que l’objet de la discipline était de les étudier. La tournure populiste, par contraste, questionne si un groupe d’auteurs réduit – quelle que soit sa diversité – doit monopoliser l’attention de la discipline, d’autant que les livres retenus constituent un échantillon totalement non représentatif des fictions réellement écrites et lues. Le populisme universitaire se reflète d’un côté dans les cours proposés et dans les articles qui se concentrent sur la fiction de genre aux dépens de la soi-disant fiction littéraire, et de l’autre, dans l’analyse quantitative associée avec Franco Moretti. Avec ses collègues au Stanford Literary Lab fondé en 2010, Moretti a encouragé une forme de « lecture à distance » à même d’agréger les notes d’innombrables doctorants expédiés sur la piste de romans plus ou moins oubliés, afin de dessiner un portrait essentiellement démographique de « l’abattoir de la littérature » (Moretti), où presque tout ce qui a été publié disparaît à jamais peu de temps après. Une telle méthode peut retrouver les traits dominants de toute une population de romans de détection, par exemple, dont seulement ceux de Conan Doyle et quelques autres ont survécu jusqu’à maintenant.
Cet élargissement du domaine de la recherche littéraire – afin d’y inclure la fiction de genre écrite par des auteurs populaires, et la vaste production obscure de « grands non lus » – promet ou menace de transformer le champ. Pensez à un puits de mine (sélection étroite de textes, exploration profonde) qui se fait remplacer par un parking (sélection large de textes, examen superficiel). Il ne faut pas, cependant, exagérer la tendance. L’activité principale reste, comme le dit de manière un peu évasive Mark McGurl dans son nouveau livre, « la lecture à rythme lent, et la rumination des œuvres de génie (ou du moins de très grande qualité), ce qui a été la raison d’être historique de la discipline ». (Sûrement, s’il existe quelque chose de plus difficile à définir que « génie », c’est « très grande qualité »). Mais McGurl, professeur à l’université de Stanford (comme l‘a été Moretti), s’efforce non seulement d’analyser « le populisme commercial » d’Amazon.com, mais aussi d’exprimer sa propre version du populisme littéraire. Au lieu de s’étendre sur de supposés grands livres, McGurl rumine sur la transformation du commerce des livres impulsée par Amazon comme « un travail de génie en soi ».
À la différence de l’ancien Odyssey ou du moderne Ulysse, le travail épique qu’est Amazon donne de la gratification immédiate à tous ses clients. « Personnification du marché », Amazon vend n’importe quel livre, sans égard du genre ou de la qualité, avec livraison gratuite le même jour ou le lendemain dans de nombreuses villes pour ses membres Prime ; d’autres librairies aimeraient pouvoir offrir le même service, mais ne peuvent rivaliser avec sa portée logistique. Et Amazon est aussi accommodant en tant qu’éditeur, publiant sous forme électronique le livre de n’importe quel auteur qui en fait la demande (moyennant 30 % des revenus) à travers son programme d’édition Kindle Direct. Pour McGurl, c’est « peut-être l’intervention la plus dramatique [d’Amazon] dans l’histoire littéraire […], une plateforme à l’usage gratuit qui a permis à de nombreux auteurs aspirants de mettre leurs livres en circulation, certains rencontrant un réel succès. » Inutile de dire qu’on parle ici du succès commercial, et non artistique.
L’intérêt du livre de McGurl vient de ses efforts d’émuler le goût omnivore d’Amazon, autant que peut se faire un seul auteur. Pour Amazon, la littérature ne ressemble à rien d’autre qu’une immense collection de marchandises, dont très peu tombent dans la catégorie générique de « fiction littéraire » (encore moins dans celle de la poésie ou du théâtre). McGurl recourt à la même optique : « Le genre étant une version, au sein du champ littéraire, du phénomène de la segmentation du marché, et de la différenciation du produit ». Dans l’âge d’Amazon (connu aussi sous le nom de « marché universel »), la fiction littéraire est devenue « un genre en soi », parmi beaucoup d’autres.
Par définition, les lecteurs-consommateurs achètent la sorte de livres qu’ils s’attendent à aimer ; en théorisant le roman comme forme, McGurl adopte le même principe hédoniste qu’Amazon et ses clients. Cela veut dire que « le roman apparaîtra […] comme un outil d’ajustement de nos états émotionnels vers la finalité désirée du bonheur, quel que soit celui-ci pour le lecteur, et quelle que soit sa complexité ou sa simplicité. » C’est en ce sens que McGurl définit la lecture comme une forme de « thérapie de vente au détail » (retail therapy) : on achète des livres qui, on l’espère, rendront heureux. La réponse au livre de McGurl dépendra en grande partie de si ses lecteurs trouvent cette définition convaincante ou tautologique (les gens veulent ce qu’ils veulent).
McGurl concède que certains lecteurs, pour des raisons professionnelles, préféreraient aux plaisirs simples « la complexité artistique qui convient à la salle de cours », mais affirme que cela ne donne pas de statut spécial aux livres d’une certaine tenue intellectuelle (highbrow) du point de vue du bonheur du lectorat, ou même de l’interprétation universitaire. « [Alors que] des œuvres de fiction littéraire fournissent de manière plus fiable des problèmes d’interprétation à discuter que ne le font des œuvres de genre, [l’importance de celles-ci] devient soudainement claire […] au niveau du genre dans l’ensemble ». Autrement dit, au lieu de se demander quelles sont les attentes créées par une œuvre « littéraire » singulière, et quelles sont les satisfactions produites, on pourrait aussi bien poser les mêmes questions à des genres entiers. Dès que les attachements traditionnels à l’individualité et à l’originalité sont mis de côté, même les briques les plus conformistes de la fiction de genre se prêteront à l’analyse autant qu’un fossile moderniste sui generis.
Logiquement, McGurl ne se penche sur la fiction littéraire que dans un seul de ses cinq chapitres. Les autres sont consacrés plutôt aux genres contemporains comme les narrations littéraires des jeux de rôles, la plupart publiés par Kindle Direct et ressemblant aux jeux vidéo ; des romances accommodant divers fétichismes sexuels, que ce soit le S/M conventionnel de Cinquante Nuances de Grey ou les propositions plus outrées comme des œuvres érotiques fondées sur la porte adulte des couches de bébé (adult baby diaper lover) ; des fantaisies épiques sur la construction des mondes ; des romans de zombies. Chez les actants « non morts » (ici « personnage » n’est pas le mot qui convient) qui peuplent tant de romans de zombies à peine différenciables, McGurl détecte une sorte d’allégorie de la production littéraire contemporaine. À travers et au sein des genres, l’apothéose amazonienne du marché a créé une marchandisation aiguë de la littérature : « la réduction de la propriété intellectuelle à une catégorie de biens génériques de moins en moins profitables, car de plus en plus disponibles et interchangeables ». Du point de vue du plaisir du lecteur, n’importe quelle occurrence de zombies dans n’importe quel genre ferait autant qu’une autre l’affaire.
Cette condition commune qui sous-tend simultanément le nivellement et la prolifération des genres caractérise, selon McGurl, l’âge d’Amazon. La littérature comme culture a convergé avec la littérature comme commerce. Les rôles du marché ont fusionné avec les rôles littéraires. Ainsi, quel que soit le genre, « pour Amazon, un auteur devrait se voir comme une sorte d’entrepreneur et de fournisseur de service ». En ce sens, il est « l’opposé du dieu moderniste, hautain ou absent, qui, pour reprendre l’image de James Joyce, se retire de son œuvre pour se couper les ongles ». Dès que la rédaction s’achève, l’auteur doit s’engager à vendre son produit. Quant aux lecteurs, « Amazon les voit comme des clients avec des besoins, surtout le besoin d’une source fiable de confort ». Le résultat de ces transformations – auteur en « auteurpreneur », lecteur en client – est de refaçonner la lecture en une forme de « thérapie de vente au détail » dans laquelle des lamelles démographiques du lectorat américain (ou éventuellement mondial) recherchent le genre qui correspond plus ou moins à leur place dans la société. À moins que l’âge d’Amazon – sur ce point McGurl reste vague – ne révèle que la consommation des livres a toujours été ainsi : une activité essentiellement thérapeutique.
Pour McGurl, la nature thérapeutique de la lecture s’étend aux engagements culturels (highbrow) autant qu’aux autres préférences, « la poursuite de belles choses [étant] une habitude comme une autre ». Désigner des textes supposément prestigieux ou sérieux comme thérapeutiques « n’est pas nécessairement une insulte », ajoute-t-il. Après tout, Aristote exalta la catharsis comme effet du drame tragique ; en d’autres termes, un soulagement émotionnel. McGurl aussi justifie l’effet thérapeutique de la lecture pour le renforcement d’un sens de bien-être, ou d’un engagement idéologique. Pourquoi pas ? Même les habitués des romans difficiles et sombres concéderaient que le refus de la consolation peut être consolant à sa manière, l’amertume étant un goût acquis. (L’exemple le plus apte dans ma propre vie serait les aphorismes d’E. M. Cioran, d’un pessimisme implacable, que j’ai toujours trouvés divertissants, surtout quand je suis dans un état des plus misérables).
Le problème avec la notion de thérapeutique avancée par McGurl est qu’elle se dérive de l’expérience – quasi universelle dans les pays riches – de la « thérapie de vente au détail », et non de la thérapie psychodynamique lancée par Freud en même temps que le modernisme littéraire émerge. Certes, la thérapie clinique partage avec le shopping un aspect consolateur, rassurant. Mais elle a également un aspect opposé, contradictoire : le défi, l’autocritique, la perturbation. Cette thérapie à double tranchant ne sert de portions de confort qu’à côté de portions de provocation, et ne permet l’accommodation aux situations de la vie qu’au prix d’une lutte contre d’autres situations possibles. Il est peut-être vrai que tous les romans promettent un peu de thérapie au sens commercial défendu par McGurl, mais pratiquement aucun ne l’offre au point d’amener des personnes troublées au divan, pour changer de vie. La différence en question ne correspond pas exactement à un genre, car la plus grande part de la fiction littéraire est très loin d’être thérapeutique au sens le plus strict du mot, alors que certains romans policiers, de science-fiction et d’horreur y réussissent à leur manière. De façon encore plus embarrassante – à un moment où les intellectuels littéraires préfèrent parler de la démographique du lectorat et de la politique textuelle, tout en gardant un silence judicieux sur les questions de valeur esthétique – la différence en question correspond plus à ce qu’on devrait appeler – en rougissant – la réussite ou non d’une œuvre d’art.
Rien de tout cela ne suggère que les romans seraient mieux envisagés comme des sessions de « thérapie », mais je prétends que si on tient à les interpréter ainsi, alors McGurl a adopté une notion de thérapie inutilement univoque et consumériste.
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McGurl est surtout un brillant sociologue de la littérature ; il est peu probable qu’un livre récent ou à venir puisse rivaliser avec Everything and Less en tant que vue d’ensemble du monde littéraire contemporain, à la fois impétueusement compréhensive et adroitement spéculative. Il prolonge et complète son livre fondamental, The Program Era : Postwar Fiction and the Rise of Creative Writing (2009), qui trace le triomphe du programme MFA (Master of Fine Arts) comme institution centrale des études littéraires aux États-Unis, protégeant les écrivains et les enseignants, de façon temporaire ou permanente, des exigences marchandes, et inculquant des critères distinctifs d’un bon (ou d’un mauvais) style. Dans Everything and Less, le décor se déplace de l’archipel de campus verdoyants à la mer du commerce, où les ventes peuvent être précisément et publiquement dépistées, et où la valeur artistique relève du jugement subjectif de n’importe qui, en supposant que la question de celle-ci soit même évoquée.
On ne peut critiquer un livre de sociologie pour son appartenance à une discipline choisie. Si McGurl suit Amazon en voyant la littérature comme un terrain plat occupé par des genres d’un statut égal, et non comme un terrain en pente aiguë formé par des dépôts de matière artistique de qualité inégale, c’est simplement par respect de la distinction fondatrice de la discipline entre faits et valeurs. Vraisemblablement, la tâche de la sociologie de la littérature est d’enregistrer le monde tel qu’il va, dans sa prépondérance démographique, au lieu de sélectionner quelques livres supposément supérieurs pour être admirés. De plus, essayer de détacher des œuvres d’art exemplaires pourrait en fin de compte ne signifier rien d’autre que d’avouer ses biais de classe, de race, de sexe, de génération, etc.
Mais le fantôme de valeur artistique ne peut être complètement exorcisé de la machine sociologique. Il y a au moins deux problèmes avec l’approche populiste de McGurl. D’abord, il est discutable qu’un abordage essentiellement démographique du champ littéraire – qui lit quel genre de livre, et en quelle quantité – produise les analyses les plus riches du champ, même dans un sens strictement sociologique. Une approche opposée se propose, de façon emblématique, par le sociologue pratiquant Theodor W. Adorno qui, dans ses essais de critique littéraire, affirme que davantage de connaissances sociologiques, sans parler de valeur esthétique, seraient à découvrir dans un petit échantillon d’œuvres d’art modernistes, étranges, difformes, et austères que dans une enquête statistique sur la production culturelle. De telles « monades », selon lui, reproduisent la totalité sociale sous une forme fracturée, prismatique, et font que les textes et partitions comprenant son propre canon étroit soient plus significatifs qu’une tabulation de best-sellers, non seulement d’un point de vue esthétique, mais aussi sociologique. Dans l’esthétique intimidante et complexe d’Adorno, peu de termes sont aussi importants que celui, en apparence le plus naïf, de « contenu de vérité », certaines œuvres en possèdant beaucoup plus que d’autres. Il s’agit alors de mettre en question l’approche populiste de McGurl sur son propre terrain sociologique.
Une seconde interrogation serait de demander si cette façon de romancer le populaire entrave ou accélère le déclin de l’étude de la littérature à l’université, et plus important, d’une forme de savoir transférable en dehors de l’institution. Les études littéraires semblent avoir fait un nouvel effort d’être pertinentes en élargissant et en nivelant leur champ afin de ressembler davantage au marché d’Amazon. Elles sont gênées par la non-représentativité sociale du vieux canon composé presque exclusivement d’hommes blancs, elles sont conscientes de la difficulté pour les étudiants d’aujourd’hui à lire les œuvres d’imagination et les textes théoriques assignés autrefois, et elles sont finalement incertaines quant à leur place dans un monde qui prétend ne plus avoir le temps pour lire (même si la consommation de podcasts et de séries augmente). Quoi qu’on pense de ce déplacement sur le plan intellectuel, jusqu’ici il semble avoir été une erreur stratégique. Pourquoi les étudiants se tourneraient-ils vers les départements de littérature pour retrouver la sorte de livres et de séries qu’ils consomment déjà ? Pas besoin d’être un génie pour savoir que le pouvoir d’attraction d’une discipline réside dans la possibilité d’acquérir des capacités nouvelles, et non dans la ratification de vieilles habitudes. Le point culminant des études littéraires, comme champ qui attirait beaucoup d’étudiants et qui influençait les itinéraires de lecture en dehors de l’université, fut atteint autour de 1970, quand le nombre d’inscrits avait quadruplé depuis les années 1940. Le texte le plus étudié à l’époque, après Hamlet, était probablement Le Paradis perdu, un poème épique en versets libres, pleins d’allusions obscures et de syntaxe diabolique, pour qui Milton espérait trouver « une audience élue, bien que peu en nombre ». Voilà, curieusement, la voie vers la popularité dans la période d’après-guerre.
Bien entendu, les conditions sociales sous-tendant l’âge d’or des études littéraires ne peuvent être recréées. Cela dit, certains diplômés vieillissants rappelleront l’avertissement de Wordsworth que tout grand écrivain « doit créer lui-même le goût pour lequel il sera admiré ». La recherche littéraire a toujours mieux réussi à créer de nouveaux appétits qu’à s’adapter aux régimes existants. Certes, former et éduquer le goût est un exercice autrement difficile que refléter les désirs populaires. Mais paradoxalement, c’est cela qui aurait la meilleure chance de devenir populaire.
Voir aussi dans la Web-revue, Tony Norfield, « Amazon, Google et le paradoxe de la productivité chez les géants de la technologie ».
Benjamin Kunkel (1972-) est l’auteur d’un roman salué, Indécision (2005), traduit en français chez Belfond (2006, prix du premier roman étranger), d’une pièce de théâtre (Buzz, 2014) et des livres d’économie politique : Utopia or Bust. A Guide to the Present Crisis (2014) ; The Commonist Manifesto (2019) ; It’s Stupid, the Economy ! (2021). Il fut cofondateur et corédacteur-en-chef de la revue n+1 (2004-14). Il a écrit des critiques littéraires pour The New Yorker, The New York Review of Books, Dissent.
Benjamin KUNKEL, « Sens et valeur marchande. Comment Amazon a changé la façon dont nous lisons-Benjamin Kunkel», Articles [En ligne], Web-revue des industries culturelles et numériques, 2022, mis en ligne le 1er janvier 2022. URL : https://industrie-culturelle.fr/industrie-culturelle/sens-et-valeur-marchande-comment-amazon-a-change-la-facon-dont-nous-lisons-benjamin-kunkel/